4 ans après l'entrée en vigueur de la loi du 6 août 2012 sur le harcèlement sexuel, un rapport parlementaire dresse un premier bilan mitigé. Les victimes hésitent encore à porter plainte. Par ailleurs, l'arsenal législatif pourrait être encore renforcé et les délais de prescription étendus. Les rapporteurs pointent aussi la nécessité de sensibiliser davantage l'entreprise.
Coup de tonnerre le 4 mai 2012 lorsque le Conseil constitutionnel, saisi d'une QPC, abroge la disposition du code pénal qui définit le harcèlement sexuel en raison de son imprécision ! Le gouvernement doit - en toute urgence - réécrire un texte sur le harcèlement sexuel. Ce sera la loi du 6 août 2012.
Un rapport d'information rédigé par deux députés, Pascale Crozon (SER) et Guy Geoffroy (LR), publié hier, dresse un premier bilan de la réforme et propose de nouvelles pistes pour lutter davantage encore contre les faits de harcèlement sexuel.
Afin de remédier aux critiques faites par les Sages, le législateur a précisé, mais aussi élargi, la définition du harcèlement sexuel. Depuis la loi du 6 août 2012, le harcèlement sexuel est le fait d'imposer à une personne, de façon répétée, des propos ou comportements à connotation sexuelle qui soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante.
Une autre situation est assimilée au harcèlement sexuel : "le fait, même non répété, d'user de toute forme de pression grave, dans le but réel ou apparent d'obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l'auteur des faits ou au profit d'un tiers".
La loi de 2012 a par ailleurs renforcé les sanctions applicables. Ces faits seront désormais punis de 2 ans d'emprisonnement et de 30 000 € d'amende Certaines circonstances aggravantes porte ces sanctions à 3 ans d'emprisonnement et à 45 000 € d'amende.
Le rapport suggère aussi de renforcer les sanctions financières. La loi Travail prévoit le remboursement par l’employeur des indemnités chômage versées à une personne licenciée à la suite d’un traitement discriminatoire ou à un harcèlement sexuel ou moral. Cette mesure avait été censurée dans le cadre de la loi de 2014 car cavalier législatif.
La loi Travail avait également envisagé de reprendre une seconde mesure censurée dans le cadre de la loi égalité entre les femmes et les hommes : le versement d'une indemnité plancher de 12 mois de salaire pour tout salarié licencié en raison d'un motif discriminatoire lié au sexe ou à la suite d'un harcèlement. L’Assemblée nationale a finalement abaissé l'indemnité "plancher" à 6 mois. Les rapporteurs condamnent ce pas en arrière : "la sanction n’est donc pas plus lourde pour un employeur qui licencie un salarié pour un motif discriminatoire que pour un employeur qui licencie un salarié sans cause réelle et sérieuse".
Les rapporteurs se félicitent toutefois d'une autre avancée de la loi Travail : l'alignement du régime probatoire du harcèlement sexuel sur celui des discriminations. |
Mais la lutte contre le harcèlement sexuel passe aussi par un travail de sensibilisation de l'ensemble des acteurs de l'entreprise.
La loi de 2012 a notamment imposé aux entreprises des obligations d'affichage. Mais, en pratique, les choses tardent à se mettre en place. "La diffusion d’informations sur le harcèlement sexuel reste limitée dans les entreprises", constatent les rapporteurs qui citent notamment le rapport sur le sexisme dans le monde du travail du Conseil supérieur de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes (CSEP). Ce dernier constate ainsi que "parmi les règlements intérieurs étudiés, le rappel des dispositions légales est incomplet dans la majorité des cas. Ainsi, n’est visée très souvent que l’interdiction de mesures de représailles et non le harcèlement sexuel en tant que tel".
Afin de renforcer le volet prévention, les rapporteurs proposent de diffuser les bonnes pratiques des entreprises vertueuses (mise en place de référents, séances de formation des cadres, diffusion de documents d'information à destination des salariés,...), mais aussi de mettre en place un guide pratique à destination des CHSCT et des représentants du personnel.
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